QUELQUES
BASES DE SELECTION CANINE :Jean Luc DELENTE
La
génétique appliquée à la sélection d'élevage suppose un minimum de
connaissances, y compris quant aux buts à atteindre. Les termes de
"génétique mendélienne " ou " quantitative " doivent être
compris et l'on ne doit pas seulement tenir compte du phénotype des sujets à
accoupler. Première obligation de l'éleveur : se tracer un PROGRAMME D'ELEVAGE.
-savoir
quel est l'effectif réel de la race concernée
-quelles
sont les tares couramment découvertes, donc à surveiller
-quels
sont les défauts et qualités de ses géniteurs
-quels
sont les points qu'il faut améliorer
-quels
sont les défauts à éliminer
La
communication entre éleveurs eux-mêmes et le Club de race me semble
primordiale, ainsi qu'ouverture d'esprit et lucidité face à son propre cheptel.
Nous
avons plusieurs moyens d'effectuer une sélection d'élevage ; chacun pourra
choisir ce qu'il pense le mieux adapté pour la programmation des accouplements
:
-au
hasard
-par
homogamie (réunir les meilleurs)
-par
exogamie (les meilleurs avec les moins bons pour améliorer la descendance)
-la
consanguinité (large ou étroite)
Cette
dernière surtout étant à l'ordre du jour, voici quelques explications :
La
consanguinité est une méthode d'élevage ; elle n'est pas responsable des bons et
des mauvais résultats. Ceux-ci dépendent avant tout de la façon dont on la
pratique. Elle consiste à accoupler des sujets de grande qualité, ayant un ou
plusieurs ascendants communs ; on tente de retrouver leur qualité dans la
descendance par le phénotype des géniteurs de départ.
L'espèce
canine étant dotée d'une grande variabilité, il n'y a pas de sélection
réfléchie sans consanguinité, sinon le programme d'élevage s'apparente au
tirage du loto. De plus, il faut comprendre que la sélection consanguine va du
mariage étroit (frère x sœur, père x fille) jusqu'à l'accouplement en 4e
ou 5egénération. Au delà, l'effet de dilution des gènes est trop
important. Il est impératif de s'assurer de la qualité des géniteurs de départ
mais aussi des intermédiaires, la consanguinité devant être pratiquée sur
plusieurs générations pour être utile.
Ce
type de sélection n'apportera jamais plus que les caractères apportés par les
géniteurs de départ. On peut et on doit éliminer dans la descendance certains
des défauts de famille dès qu'ils apparaissent, mais pour les qualités, il est
impossible de dépasser un certain seuil, une fois qu'il est atteint.
Chaque
éleveur devrait sélectionner au mieux sa souche(le phénotype qu'il préfère en
restant dans les limites du standard), ce qui n'empêchera pas les accouplements
éventuels entre ces différentes souches, permettant ainsi de conserver une
certaine variabilité. Ce qui fait la richesse d'une race, c'est le plus ou
moins grand nombre d'élevages de sélection. La consanguinité la plus étroite
qui devrait être pratiquée est le 3-2 ou 2-3, ou bien encore le 1-3 ou
3-1(parents =1 ; grands-parents =2 ; arrière-grands-parents = 3). Les résultats
seront, certes, moins rapides, mais plus homogènes et plus durables pour
l'ensemble de l'élevage. Toute interruption de la consanguinité interrompt la
sélection et mène à l'hétérozigotie. A l'inverse, une sélection trop étroite
constitue une erreur dangereuse, les résultats ne pouvant être que lents et
progressifs. L'éradication d'un défaut ou même d'une tare ne peut se faire sur
2 ou 3 générations. L'hérédité quantitative est trop complexe pour permettre
d'obtenir une expression constante des caractères recherchés ou non souhaités.
Les
races à faible effectif sont particulièrement sensibles à une éventuelle dérive
génétique ou à une sélection trop étroite. Il serait présomptueux de penser
qu'une sélection rigoureuse puisse permettre d'obtenir plus rapidement ce que
l'on n'a pas réussi sur plusieurs générations.
Toute
race doit reposer sur un nombre relativement élevé de géniteurs ; on éliminera (de
la reproduction) les sujets porteurs de nombreux défauts, ou SANS QUALITES. On
se polarisera sur ceux qui possèdent de grandes ou de nombreuses qualités en
fermant les yeux sur des défauts mineurs. Le reproducteur idéal n'existe pas.
Avec un certain seuil de recherche trop élevé, on ne conserve que trop peu de
reproducteurs et on se prive ainsi de nombreux gènes favorables, ce qui réduit
la variabilité.
Intérêt
de l'effectif d'une race pour l'utilisation de la consanguinité :
Certaines
races, à faible effectif, sont réputées consanguines, d'autres sont apparues
par l'utilisation à trop grande échelle de certains étalons. Il faut préserver
la diversité génétique intra-race, afin de conserver aux animaux de bonnes
qualités d'élevage (fertilité, prolificité, robustesse) et de permettre à la
race concernée de s'adapter à une modification des objectifs de sélection. Il a
été prouvé scientifiquement que la consanguinité détériore les qualités
d'élevage, les chiennes devenant en moyenne, moins fertiles, moins prolifiques,
et leurs produits plus fragiles. Les effets sont d'autant plus marqués que la
consanguinité est élevée (homozigotie). Le croisement, au contraire, les
améliore (phénomène d'hétérosis = interactions favorables entre gènes dès lors
qu'une grande variété de gènes compose le phénotype). L'objectif est de
conserver une variabilité génétique suffisante pour ne pas altérer les qualités
d'élevage et pouvoir conserver des possibilités d'évolution.
Mesures
conservatoires pour une variabilité génétique intra-race :
Races
à très faible effectif :
-s'assurer
du nombre d'étalons utilisables supérieur au minimum nécessaire pour maintenir
l'effectif génétique le plus haut possible.
-proscrire
systématiquement les accouplements consanguins étroits et choisir les animaux
les moins apparentés entre eux.
On
n'utilisera la consanguinité large que s'il existe plusieurs souches
différentes que l'on pourra retremper si nécessaire.
Conclusion
:
Il
importe de bien différencier "race " et " souche " de façon
à conserver à la première un potentiel d'évolution, ce qui n'est pas
indispensable à la seconde, qui peut disparaître avec l'éleveur. Le maintien
d'une variabilité génétique suffisante est la condition indispensable à la
survie d'une race et dépend de la mise à la reproduction d'un maximum d'animaux
d'origines différentes.
L'éleveur
d'une race à très faible effectif doit donc raisonner non seulement pour son
élevage (sa souche) mais aussi pour la race entière, tâche qui incombe
principalement au Club de Race (grâce aux critères de non-confirmation, à la
sélection d'élevage avec les sujets " Recommandés" et les
"Elites") lorsque l'effectif est suffisant.
|