Stage de formation des juges -ENVT- Février 2000
23, Chemin des Capelles 31076 Toulouse Cedex
Le chien, comme la plupart des espèces ayant fait l'objet de
la domestication, est une espèce sociale, c'est-à-dire une espèce composée
d'individus vivant en groupes et interagissant continuellement les uns avec les
autres. Les groupes sociaux formés par les canidés sont appelés des meutes. On
considère généralement que les chiens de compagnie s'intègrent à leur famille
d'adoption comme si elle constituait leur meute. Dès lors, une bonne connaissance
du comportement social du chien est essentielle pour instaurer un système relationnel
efficace entre les maîtres et leurs compagnons et, par conséquent, favoriser
une cohabitation harmonieuse. L'étude du comportement social du chien comporte
trois volets, qui seront abordés successivement :
la structure sociale, c'est-à-dire l'organisation sociale et
les règles de vie au sein de la meute,
les moyens de communication,
la socialisation, ou développement du comportement social
chez le jeune.
I - LA STRUCTURE SOCIALE CHEZ LE CHIEN
1 - organisation hierarchique au sein d'une meute de chiens
La meute se caractérise par une organisation hiérarchique précise,
avec des relations de dominance et de subordination. Le statut de dominant confère
aux intéressés un certain nombre de prérogatives qui s'articulent autour de
quatre pôles principaux : l'accès à l'alimentation, l'accès à la reproduction,
la gestion du territoire, et la gestion des contacts.
«L'accès à l'alimentation
Les individus dominants disposent d'un accès prioritaire à l'alimentation.
Ils mangent en premier et s'octroient les meilleurs morceaux. La vitesse
d'ingestion est également un facteur important : les dominants mangent
lentement, surtout s'ils sont observés par les autres chiens. Certains cessent
même de manger lorsque que les dominés s'éloignent ! Ce n'est que lorsque les
dominants ont terminé leur repas que les autres membres de la meute peuvent à
leur tour s'approcher de la nourriture (les dominants en laissent toujours un
peu), en émettant de nombreux signaux d'apaisement (cf. infra). L'ingestion est
très rapide chez les dominés, qui mangent dans l'indifférence totale des
dominants.
• L'accès à la reproduction
Au sein de la meute, le couple dominant est en principe le
seul à se reproduire ou, du moins, bénéficie d'une priorité pour la reproduction. Ainsi,
seul le mâle dominant peut saillir les chiennes en présence du reste de la meute. Il peut
interrompre le comportement sexuel des autres individus, mais sa seule présence
peut suffire à inhiber toute tentative d'expression de la sexualité chez les
dominés. Ces derniers ne peuvent donc opérer qu'en cachette, s'ils en ont
l'opportunité.
• La gestion de l'espace
Le contrôle de l'espace est une prérogative des dominants,
qui s'attribuent les meilleurs endroits de repos. Ils se positionnent en des
lieux stratégiques, d'où ils peuvent surveiller les allées et venues du reste
du groupe. Il s'agit alors de points centraux dans l'espace occupé par la meute
et souvent situés en hauteur. Les individus dominés occupent des lieux plus périphériques,
et peuvent être délogés à tout moment par les dominants.
»La gestion des contacts
Contrairement aux dominés, les dominants peuvent à tout
moment et n'importe où initier des interactions avec les autres membres du groupe.
Ils décident également de la durée des interactions. Eux seuls ont le droit de
menacer et de pincer sans déclencher de riposte.
Malgré de telles distorsions dans la répartition des
ressources en fonction du rang hiérarchique, les relations hiérarchiques au
sein de la meute sont remarquablement stables. Cette caractéristique, que l'on
retrouve chez les autres espèces sociales, s'explique par le fait que les
relations de dominance/subordination ont une valeur adaptative très importante
pour l'espèce. En effet, elles limitent considérablement la fréquence des
combats. Chaque individu connaît parfaitement les privilèges assignés à son
rang hiérarchique, et respecte ceux des animaux de rang supérieur. Ceci permet
la plupart du temps d'apporter une solution non violente aux situations de
conflit. Lorsque, de manière occasionnelle, un individu transgresse les limites
associées à son rang, une simple menace de la part du dominant suffit
généralement pour que l'animal subordonné réagisse de façon appropriée. Il peut
s'agir d'une réponse d'évitement (fuite, retrait) ou de l'adoption d'une
posture d'apaisement ou de soumission (cf. infra). De plus, avoir un statut de
dominé n'est en aucun cas vécu comme une situation péjorative pour un chien :
la position hiérarchique doit en effet être considérée comme une fonction
plutôt que comme un privilège. Ce qui importe surtout, c'est la stabilité de la
position hiérarchique, l'absence d'ambiguïté. En effet, les situations
d'instabilité hiérarchique induites expérimentalement ou naturellement
(ressources limitées) est génératrice de stress à la fois pour les dominants,
les subdominants, et les dominés. On constate alors d'importantes perturbations
comportementales et physiologiques (ulcères gastriques, perte de poids, maladies...).
2 - organisation hierarchique au sein de la meute familiale
Au sein de la famille, le chien doit occuper la position de
dominé vis à vis de toutes les personnes. Malheureusement, il n'en est pas
toujours ainsi et de nombreuses situations, qui n'ont pas toujours de
signification évidente pour les maîtres, peuvent conduire le chien a se considérer
comme dominant. Voici quelques exemples de comportements par lesquels un chien
peut exprimer sa dominance :
Chien qui mange en 1er, quand il veut, à son aise, qui réclame
à table et obtient...
Chien qui grogne quand on s'approche de lui lorsqu'il qu'il
mange
Chien qui mange lentement
Chien qui cesse de manger quand ses maîtres s'éloignent ou
sortent de la pièce
Chien qui a des relations privilégiées avec le propriétaire
de sexe opposé
Chien qui cherche à s'interposer, à empêcher les personnes
de s'embrasser...
Chien qui chevauche les genoux de ses maîtres, qui s'excite
ostensiblement sur des coussins
Chien qui franchit les portes en 1er ou qui passe en 1er
lorsque l'espace est limité
Chien qui se couche où il veut, en des endroits d'où il peut
surveiller les allées et venues: zones de passage (couloir, hall d'entrée...),
en hauteur (sur un fauteuil, une marche d'escalier...), lieu stratégique (devant
la chambre à coucher, dans le lit...). Et qui grogne quand on essaie de l'en déloger.
Chien qui empêche les personnes de se déplacer, d'entrer
dans une pièce ou d'en sortir, d'accéder à certaines zones, de répondre au téléphone,
de se parier...
Chien qui « donne des ordres » (aboie pour sortir, entrer,
manger...)
Chien qui initie ou sollicite les activités (caresses, jeux,
promenades) et décide de leur durée
Chien qui n'obéit que lorsqu'il reçoit une gratification
- Chien qui
donne sa patte de façon insistante, monte sur les genoux, pose ses pattes antérieures
sur les épaules
- Chien qui refuse
les contraintes (être mis en laisse, pose d'une muselière, brossage, manipulations...).
Cette liste n'est bien sûr pas exhaustive. De plus, aucun de
ces comportements considérés séparément ne peut suffire à poser un diagnostic
de dominance. Il faut plutôt se baser sur un ensemble de comportements qui vont
dans ce sens. En effet, des phénomènes d'apprentissage peuvent tout à fait modifier
le sens de certains signaux pour le chien. Par exemple, un chien dominant peut
se coucher sur commande afin d'obtenir une friandise. De même, un chien dominé
par son maître peut poser sa patte sur les genoux de son maîtres, parce qu'il a
appris qu'à cette occasion, il recevait une caresse. Un chien peut même dormir dans
le lit de son maître sans être pour autant dominant. L'analyse des signaux de
communication, et notamment les signaux visuels, peut permettre d'avoir une idée
plus précise sur la façon dont l'animal se considère.
Il - LES MOYENS DE COMMUNICATION
La formation et le maintien des relations sociales chez les
canidés reposent sur un système de communication élaboré et très efficace.
Avant d'entrer dans les détails de ce système, rappelons que la communication désigne
l'émission par un animal d'un signal qui provoque une réponse chez un autre
animal, de telle sorte qu'un avantage soit acquis soit par l'animal qui reçoit
le signal, soit par celui qui le transmet, soit par le groupe dont ils font partie.
La nature des signaux échangés varie selon les espèces. Chez le chien, il
s'agit principalement de signaux olfactifs, de signaux visuels, de signaux
tactiles, et de signaux auditifs.
1 - communication olfactive
Le sens olfactif est particulièrement développé chez le
chien, avec des seuils de détection1 pour la plupart des substances odorantes
environ 100 000 fois plus bas que ceux de l'homme. Pour certaines substances,
comme l'acide acétique (un composé sécrété par la peau des mammifères), il serait
dix millions de fois plus bas que celui de l'homme. De telles performances
justifient de nombreuses utilisations du chien, tant sportives (chasse), qu'utilitaires
(chiens de pistage, chiens de dépistage de drogue, chiens d'avalanche...). Ces aptitudes
olfactives du chien s'expliquent par l'importance de la surface de son épithélium
olfactif (jusqu'à 170 cm2, contre 10 cm2 pour l'homme) et de la densité de
cellules olfactives qu'il renferme (100 fois plus importante que chez l'homme).
Les chiens sont également pourvus d'un organe voméro-nasal
(aussi appelé organe de Jacobson), qui est une structure située sur le plancher
des cavités nasale, reliée à la cavité buccale par deux canaux. Cet organe est
spécialisé dans la perception des phéromones, qui sont des signaux chimiques
libérés dans le milieu extérieur et qui jouent un rôle très important dans la
communication intra-espèce.
1.1 - Communication olfactive entre chiens
Le canal olfactif est très utilisé pour la communication
entre chiens, que ce soit à courte ou longue distance (plusieurs kilomètres).
Comparativement aux autres signaux, les messages olfactifs présentent
l'avantage de persister dans l'environnement durant de longues périodes. Ils
peuvent donc transmettre des informations en l'absence de l'individu qui les a émis.
La communication olfactive chez le chien repose sur deux types de signaux chimiques
: les phéromones et les odeurs sociales.
1 C'est-à-dire
la valeur de la plus petite concentration détectable dans l'air
a) Les phéromones
Les phéromones véhiculent différents types de messages, en
particulier sexuels et territoriaux. Elles peuvent aussi fournir des
renseignements très précis sur l'identité de l'émetteur : son sexe, son état
physiologique, son statut hiérarchique, etc. Lorsqu'elles sont perçues par un
individu, les phéromones peuvent déclencher chez ce dernier diverses réponses,
comportementales et/ou physiologiques, en modulant la libération de différentes
hormones et de certains neurotransmetteurs. Elles peuvent aussi modifier les caractéristiques
réactionnelles et émotionnelles de l'individu récepteur, comme les tendances à
fuir, à agresser, ou à se soumettre. Signalons que ces médiateurs chimiques sont
efficaces quel que soit le passé de l'animal, c'est-à-dire indépendamment de
tout processus d'apprentissage. Les phéromones émises par un individu peuvent
donc potentiellement être perçues et décodées par tous les individus de son espèce.
La détection des phéromones met en jeu un comportement
caractéristique : le comportement de flehmen. Au cours du flehmen, l'animal
retrousse ses babines et aspire une large bouffée d'air par sa cavité buccale,
ce qui favorise l'accès des phéromones à leurs récepteurs situés dans l'organe
voméro-nasal. Chez le chien, ce comportement est plus discret que dans d'autres
espèces (le cheval, les ruminants ou le chat, par exemple) ce qui a amené
certains auteurs à réfuter son existence dans l'espèce canine. D'autres auteurs
identifient cependant ce comportement dans le halètement et plissement de la
truffe que l'on observe par exemple lorsqu'un chien explore des déjections.
La production des phéromones est le fait de différentes
glandes localisées dans la peau (glandes sébacées et sudoripares), les
muqueuses (génitales et urinaires notamment), et certaines structures spécialisées
comme les glandes anales et périanales. Des dégradations microbiennes peuvent également
intervenir et modifier la composition chimique des produits initiaux. Ces
actions microbiennes sont parfois indispensables pour aboutir aux composés phéromonaux
efficaces.
Les principales sources de phéromones connues chez le chien
sont :
les glandes anales et périanales. Leur contenu est le plus
souvent évacué en même temps que les selles, mais la vidange peut aussi se
produire indépendamment de la défécation (lorsque l'animal a peur, par
exemple). Le volume de la sécrétion, ainsi que son odeur, sa couleur et sa
composition chimique varient de façon importante d'un sujet à l'autre et d'un
jour à l'autre, ce qui laisse penser que ces sécrétions jouent un rôle dans la
reconnaissance des individus et la détermination de leur état physiologique. On
suppose qu'elles interviennent dans la communication sexuelle, la communication
hiérarchique et peut-être dans la transmission de phéromones d'alarme, pour
signaler un éventuel danger.
les selles. Les chiens manifestent beaucoup d'intérêt pour
les matières fécales émises par d'autres individus, et les flairent longuement.
Cependant, la nature des informations qu'elles véhiculent reste encore
inconnue. Chez le loup, les matières fécales sont impliquées dans le marquage
du territoire, mais cette fonction n'a pas pu être mise en évidence chez le
chien domestique.
l'urine. Les dépôts d'urine jouent certainement un rôle
important dans la communication entre chiens. Lors de leurs déplacements, les
mâles adultes ne vident pas d'un trait le contenu de leur vessie, mais le
fractionnent en de multiples endroits généralement bien visibles (angle des
murs, poteaux, troncs d'arbres...) et au niveau des déjections laissées par
d'autres individus. Le lever du postérieur lors de la miction favorise une
dispersion meilleure et en hauteur du liquide. Ce comportement propre aux mâles
adultes est souvent interprété un comportement de marquage territorial, par
analogie avec ce qui a été établi chez le loup. Cette hypothèse est cependant
sujette à discussion. En effet, il est fréquent d'observer un chien entrer dans
une zone occupée par un autre chien et y uriner. De plus, les dépôts d'urine n'éloignent
pas les autres chiens. Si l'on ne peut exclure que, dans certains cas, le
marquage urinaire ait une signification territoriale, le message olfactif
contenu dans l'urine fournirait en fait surtout des Informations sur l'identité
de celui qui l'émet (sexe, état physiologique, position hiérarchique...).
Ainsi, les chiens mâles passent en moyenne deux fois plus de temps à flairer
l'urine d'un mâle inconnu que celle d'un mâle connu. Les femelles effectuent
mois de dépôts urinaires que les mâles, ce qui ne les empêchent pas d'émettre
des signaux via leur urine : on sait que les mâles sont plus attirés par
l'urine d'une chienne en chaleur que par ses sécrétions vaginales ou celles de
ses glandes anales. L'urine d'une chienne en œstrus peut être perçue à plusieurs
kilomètres. Le surmarquage, c'est-à-dire le recouvrement des déjections
laissées par d'autres individus, est parfois réalisé par les femelles.
les sécrétions vaginales. Lors de l'œstrus, la composition
des sécrétions vaginales est profondément modifiée. Ces sécrétions déclenchent
alors une augmentation sensible du marquage urinaire chez les mâles, et
accroissent la fréquence et la durée du flairage de la zone anogénitale des
femelles.
• autres sources de phéromones. Plusieurs autres glandes
synthétisent des phéromones dont la fonction reste à explorer. Citons par
exemples les glandes faciales (dont on sait qu'elles jouent un rôle important
dans la communication chez le chat), les glandes podales (coussinets plantaires
et espaces interdigités), le conduit auditif externe qui produit le cérumen, la
salive, etc.
En complément, l'animal qui dépose des phéromones peut
produire des signaux qui favorisent la détection des phéromones. Il s'agit
surtout de signaux visuels. La posture de soulignement la plus évidente est
celle du lever de la patte déjà évoquée ci-dessus. Il est intéressant de noter
qu'un chien qui se considère comme dominant lève sa patte très haut. Le
comportement de grattage du sol avec les postérieurs, parfois observé après l'élimination,
pourrait de même constituer un signal visuel, de même que les traces qu'il
provoque. Il est également possible que le grattage permette le dépôt de phéromones
produites au niveau des coussinets plantaires et des espaces interdigitaux.
Enfin, le grattage pourrait favoriser la dispersion des odeurs et des phéromones
associées aux déjections.
b) Les odeurs sociales
Les odeurs sociales sont des signaux de communication qui,
contrairement aux phéromones, prennent une signification grâce à
l'apprentissage. Les odeurs sociales interviennent dans l'odeur de groupe : la
signature olfactive des membres d'une même meute comporte des composantes
communes à tous, ce qui leur permet d'identifier un individu comme faisant
partie ou non du groupe. Sur la base de ce que l'on sait chez d'autres espèces,
ces composantes communes sont vraisemblablement sous-tendues par différents
facteurs, en particulier génétiques et alimentaires. Les odeurs participent
aussi à la reconnaissance individuelle, c'est-à-dire à l'identification d'un
congénère particulier. Cette fonction est particulièrement importante dans la
mise en place et le maintien de la relation chienne-chiots et sans doute aussi
dans l'identification des personnes vivant dans l'entourage du chien.
1.2 - Communication olfactive homme-chien
L'homme étant très mal équipé pour percevoir les odeurs et
les phéromones, les signaux olfactifs lui sont d'une faible utilité pour
communiquer avec son chien. En revanche, et même si l'on dispose de très peu de
données à ce sujet, il est tout à fait possible et même probable que les chiens
soient capables non seulement de percevoir, mais aussi d'attribuer une signification
aux odeurs et phéromones humaines. Par exemple, lorsqu'un enfant entre dans la
puberté, il n'est pas rare que le chien de la maison change de comportement vis
à vis de lui. Ces deux exemples suggèrent que les chiens sont sensibles à la
modification des caractéristiques olfactives et/ou phéromonales des personnes
qui les entourent.
Si le monde canin est un monde structuré avant tout par les
stimuli olfactifs, les autres stimuli jouent également un rôle important...
Heureusement pour l'homme, d'ailleurs! En effet, les êtres humains sont très
mal équipés pour percevoir les signaux olfactifs et sans ces autres stimuli,
ils auraient bien des difficultés à interagir et à communiquer avec leurs
chiens.
2 — communication visuelle
L'acuité visuelle du chien est inférieure à celle de
l'homme. En particulier, les chiens ont du mal à percevoir le contour des
objets immobiles. Par contre, les objets en mouvement sont parfaitement
identifiés, même à grande distance (plusieurs centaines de mètres2). Le chien
aurait une meilleure vision nocturne que l'homme. Contrairement aux idées reçues,
les chiens ne voient pas en noir et blanc : ils perçoivent certaines couleurs, en
particulier le vert et le bleu. En revanche, ils perçoivent mal le rouge (tout
comme les chats, d'ailleurs). En somme, leur vision est proche de celle des
daltoniens !
2 Selon certaines observations, les chiens pourraient
percevoir un signe de la main à 1,5
km de distance. En revanche, la vision est floue à 25 cm (presbytie).
2.1 - Communication visuelle entre chiens
Les signaux de communication empruntant le canal visuel comprennent
les postures corporelles, les mimiques faciales et les mouvements. Un grand
nombre de structures peuvent intervenir dans la communication visuelle : les
oreilles, les yeux, la gueule, la queue, le pelage... Certains signaux visuels
sont émis de façon involontaire, comme la piloérection, les modifications du
diamètre pupillaire (mydriase ou myosis3), les mouvements et la position de la
queue, la position des oreilles (dressées ou couchées), etc. D'autres signaux,
comme la persistance et la direction du regard et la plupart des mouvements,
correspondent à des signaux volontaires. Dans plusieurs races, certaines
structures impliquées dans la communication visuelle ont été modifiées par la sélection
génétique. Par exemple, la piloérection est peu visible chez les chiens à poils
long, de même que les caractéristiques du regard. Les interventions
chirurgicales, comme l'otectomie et la caudectomie, peuvent également modifier
la forme des signaux émis. Il est cependant probable que les déficits induits
par ces modifications sont, partiellement au moins, compensés par l'émission simultanée
de plusieurs signaux exprimant le même message.
3 mydriase : augmentation du diamètre de la pupille. Mysosis
: réduction du diamètre de la pupille.
a) Quelques
attitudes caractéristiques
Les principales postures ou attitudes adoptées par les canidés
lors des interactions sociales sont représentées sur la figure 1.
Un dominant se donne un aspect le faisant apparaître plus
grand : corps tendu et rigide, tête et queue portées haut, oreilles dressées.
Son regard est orienté vers le congénère (vignettes 1 et 2). Un dominant
agressif ajoute à cette attitude une piloérection dorsale, un rétrécissement
pupillaire (mysosis), un retroussement des babines, et une extériorisation des dents
(vignette 6). Au fur et à mesure que la peur de l'animal augmente, on observe
un abaissement de la queue et de la tête, un fléchissement des pattes, et une
orientation vers l'arrière des oreilles. La piloérection est toujours présente
mais sa répartition change : elle devient surtout visible au niveau de la nuque
et de la croupe (vignettes 7 et 8).
Un dominé cherche à paraître plus petit : posture basse,
queue vers le bas ou plaquée contre le corps, oreilles couchées et regard détourné
(vignette 5). Un dominé qui présente de la peur réduit encore plus son format
apparent. Il semble se recroqueviller, place sa queue entre ses membres postérieurs
et plaque ses oreilles contre sa nuque (vignette 9). La soumission peut
s'exprimer de façon plus intense, lorsque l'animal se couche sur le flanc, avec
présentation de la gorge, du ventre et de l'aine. Une miction de soumission
peut également être produite (vignette 10).
Quand ils s'approchent des dominants, les animaux subordonnés
émettent de nombreux signaux d'apaisement, comme s'ils cherchaient à rassurer
le dominant sur les intentions de cette approche : frétillements, agitation
rapide la queue, posture basse (vignette 4).
L'invitation au jeu, bien connue de tous les propriétaires
de chiens, s'exprime de diverses façons : aplatissement de l'avant du corps
avec relèvement de l'arrière-train, la queue présentant d'importants mouvements
latéraux, lever d'un antérieur (vignette 3)... Les oreilles sont dressées ou
couchées. Des sauts, des tournoiements et une alternance de mouvements
d'approche et de retrait sont fréquemment observés. Parfois, on note l'adoption
de postures de soumission et/ou de dominance.
b) Les rituels
Certains signaux visuels sont appelés des rituels. Il s'agit
de séquences comportementales particulières qui dérivent de comportements élémentaires
souvent liés à des fonctions vitales (manger, éliminer, se reproduire..). Ces
comportements évoluent de telle façon qu'ils perdent leur fonction ou leur
signification initiale pour acquérir une fonction de communication. Ils sont
alors relativement stéréotypés, immuables
(théâtralisés). Dans
tous les cas, le message transmis est clair, c'est-à-dire précis et dépourvu
d'ambiguïté. Citons deux exemples de rituels : la posture « couché avec présentation
du ventre », qui relève de la communication visuelle, et le mordillement des babines
qui correspond à un comportement impliqué de la communication tactile, que nous
verrons ensuite.
la posture de soumission en décubitus thoraco-dorsal (latéro-dorsal)
proviendrait de la séquence d'élimination observée chez le chiot nouveau-né.
Jusqu'à l'âge de trois semaines, les chiots ne sont pas autonomes pour l'élimination.
Celle-ci est déclenchée par la chienne qui, après la tétée, retourne ses chiots
d'un léger coup de museau et lèche leur région périnéale. Chez l'adulte, le
retournement avec présentation du ventre n'a plus rien à voir avec l'élimination
: c'est une attitude de soumission. Cette posture a un effet inhibiteur
puissant sur l'agressivité du congénère. Lorsqu'on punit un chien, il faut donc
immédiatement stopper la correction dès qu'il adopte cette position. Sinon, l'animal
est confronté à une situation de non-sens éthologique génératrice d'anxiété.
le mordillement des babines est emprunté au comportement
alimentaire des chiots. Au moment du sevrage (entre 5 et 7 semaines), les
jeunes mordillent les babines de leur mère pour solliciter la régurgitation
d'aliments prédigérés. Ce comportement peut être observé chez l'adulte, sous
une forme peu modifiée. Son rôle n'est plus d'obtenir de la nourriture, mais
d'apaiser un congénère (signal d'apaisement).
2.2 - Communication visuelle homme-chien
II faut savoir que l'homme, de part sa posture et ses
attitudes, peut également émettre des signaux qui sont parfaitement décodés par
le chien. Un certain nombre de ces signaux sont consignés ci-dessous.
Postures et attitudes humaines et leur signification pour le
chien
- Position du
torse :
Inclinée vers l'avant (attitude de dominant)
Verticale (attitude neutre)
Inclinée vers l'arrière (attitude de dominé)
- Vitesse
d'approche de l'animal :
Cinétique rapide (approche agressive)
Vitesse moyenne et constante (approche neutre ou de
dominant)
Cinétique heurtée, progression entrecoupée d'arrêts
(approche de dominé)
- Trajectoire
de l'approche
Directe, vers la tête ou le flanc (approche de dominant)
Détournée, vers la croupe (approche de dominé)
- Direction
du regard
Dans les yeux (agression, provocation au combat)
Sur la croupe (attitude du dominant)
Sur le côté (attitude neutre ou du dominé)
- Persistance
du regard
Fixation (attitude de dominant ou de provocation au combat)
Regard interrompu ou intermittent (attitude d'apaisement ou
de soumission)
3 - communication tactile
3.1 - Communication tactile entre chiens
Chez le chien, la communication tactile s'inscrit dans le
prolongement de la communication visuelle. Après la phase d'approche où les
signaux visuels prédominent, il arrive un moment où les deux protagonistes sont
très proches l'un de l'autre. Le dominant et le dominé se disposent alors
souvent en T l'un par rapport à l'autre, le dominant occupant la position de la
barre verticale et le dominé, celle de la barre transversale. Si l'interaction
se poursuit, la communication tactile prend alors le pas sur la communication
visuelle. On peut classer les contacts sociaux en deux catégories : les
contacts de domination et les contacts d'apaisement. Les morsures seront considérées
à part car leur signification varie en fonction de leur forme.
• /es contacts de domination
Les contacts de domination sont ceux qu'effectué un animal
qui se perçoit comme dominant. Ils ont pour cible le cou, le garrot ou la zone
lombaire du dominé. Le chien dominant peut poser sa tête ou une patte antérieure
sur ces régions. Il se place ainsi en surplomb par rapport au dominé. Si ces
premiers échanges se passent bien (c'est-à-dire, si le dominé se laisse faire),
ils peuvent ensuite laisser place à un chevauchement. Le dominant étend alors
toute la partie antérieure de son corps sur le garrot ou la croupe du dominé.
Il arrive également que le dominant bouscule le dominé.
• /es contacts d'apaisement
Les contacts d'apaisement sont, comme leur nom l'indique,
destinés à apaiser le partenaire social. Ils sont le plus souvent initiés par
l'individu qui se perçoit comme dominé et sont dirigés vers le dominant. Les
contacts d'apaisement font généralement suite à une approche basse, c'est-à-dire
avec les pattes légèrement fléchies et la queue agitée rapidement (signaux
d'apaisement visuels). Le chien se place ensuite de telle façon qu'il puisse
frotter son flanc contre le corps du congénère. Dans certains cas, on observe
des flairements et des léchages dirigés vers la face du congénère, ou un petit
léger mordillement de l'encolure ou des babines : c'est le rituel de demande de
régurgitation évoqué plus haut. Ces signaux sont souvent accompagnés par l'émission
de vocalises qui sont la plupart du temps des gémissements.
• /es morsures
La façon dont un chien mord est révélatrice de la façon dont
il se perçoit. L'intensité de la morsure est d'autant plus forte que le chien a
du mal à se situer dans la hiérarchie.
Dominance
|
Posture dressée Grognements forts Regard fixe
|
Pince Contrôle ++ de la morsure
|
Retrait calme Pose sa patte sur l'animal mordu, lèche...
|
Ambiguïté hiérarchique
|
Approche basse Grognements +/-regard détourné, mydriase
|
Tient morsure Morsures multiples
|
Fuite « profil bas », plutôt rapide vers un recoin
(refuge)
|
Si l'agresseur est un chien qui se perçoit comme dominant :
la séquence de morsure est caractérisée par une phase préalable où l'animal
adopte une posture haute queue et oreille dressées) et grogne fortement. Son
regard est fixé vers le congénère. La morsure est très brève : il « pince » ou «
chique », c'est-à-dire qu'il mord puis lâche rapidement sa prise. Il contrôle
parfaitement sa morsure, et celle-ci laisse des marques peu accentuées. Après avoir
mordu, il se retire calmement. Il peut aussi réaliser un contact de domination.
Si l'agresseur est un chien dont la position hiérarchique
est ambiguë : on observe des grognements émis tête basse. Le regard est détourné
et on a une mydriase traduisant une activation émotionnelle importante. Il
tient sa morsure, ou réalise des morsures multiples. Ensuite, il fuit en
adoptant une attitude « basse » : dos voûté et va se réfugier dans un recoin.
3.2 - Communication tactile homme-chiens
• les contacts de domination
Un chien qui se perçoit comme dominant cherchera par exemple
à poser sa patte ou sa tête sur les genoux, le thorax ou les épaules (selon le
rapport de taille) de ses maîtres, à se placer en surplomb et/ou à effectuer
des mouvements de monte vis à vis d'une personne couchée sur le sol ou d'un
enfant qui marche à 4 pattes.
• les contacts d'apaisement
Exemple de situations au cours desquelles les chiens réalisent
des contacts d'apaisement vis à vis de leur maître : chien qui vient d'être
grondé par son maître et qui revient vers ce dernier avec une posture basse,
pour lui lécher les mains, les oreilles ou le cou pour l'apaiser ; qui vient se
frotter contre sa jambe.
• Les morsures
Une situation caractéristique est celle du chien qui se perçoit
comme dominant et qui, après avoir mordu son maître, revient vers ce dernier et
pose sa patte sur son genou ou lèche la zone mordue. Ces comportements sont
souvent interprétés à tord par les maîtres comme une demande de pardon. Or, tolérer
ces comportements revient à l'inverse à accepter sa domination. Paradoxalement,
il sera plus facile de faire basculer au rang de dominé un chien dont la
morsure est multiple, prolongée qu'un chien qui pince, ou chique, bien que sa
morsure soit moins douloureuse. Cette situation est assez rare, car l'ambiguïté
est plus fréquente que la domination établie et acceptée .
Tableau récapitulatif des principales caractéristiques du
chien dominant et du chien subordonné lors d'une interaction sociale.
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chien dominant
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chien dominé
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Regard
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Orienté, fixant le dominé
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Fuyant, détourné, évitant celui du dominant
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Oreilles
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Dressées, orientées vers le dominé
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Couchées en arrière, contre la nuque
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Face
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Babine supérieure retroussée
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Commissure des lèvres tirées en arrière
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Dents
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Extériorisées
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Port de tête
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Haut
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Bas
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Port de queue
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Haut
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Bas
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Allure générale du corps
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Tendue, rigide, haute
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Recroquevillé, basse
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Mouvements
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En surplomb par rapport au domine Tête ou patte antérieure
posée sur le dominé Chevauchement
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Position couchée sur le côté, avec un postérieur levé Présentation
du cou, de l'abdomen Acceptation du chevauchement, émission de signaux d'apaisement
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Autres
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Grognements
Pincement
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Gémissements
Miction
Fuite
|
4 - communication auditive
Le chien possède une ouïe performante, qui lui permet de
percevoir des fréquences comprises entre 20 et 60.000 à 100.000 Hz. Pour
comparaison, l'homme n'entend pas les sons dont la fréquence dépasse 16.000 Hz.
Certains sons, qui sont des ultrasons pour l'homme, sont donc audibles pour le
chien. L'application la plus répandue de cette différence est le sifflet à
ultrasons, qui permet aux propriétaires de donner des ordres à leur chien en toute
discrétion : il ne dérange personne et lorsque l'animal n'obéit pas, il évite
au propriétaire... de se ridiculiser !
4.1 - Communication auditive entre chiens
Les chiens émettent une large gamme de vocalises, qui vont
du gémissement à l'aboiement, en passant par le grognement, les cris aigus, ou
encore le hurlement. En l'état actuel des connaissances, il n'est pas possible
d'attribuer à chacune de ces productions sonores une fonction de communication
définie - si tant est qu'elles en aient une. En s'appuyant sur les
circonstances dans lesquelles elles sont observées, on peut néanmoins associer
certaines vocalises à des états émotionnels distincts (Tableau). Remarquons qu'aucune
vocalise ne peut être rattachée de façon univoque à un état émotionnel particulier.
Interprétation des principaux types de vocalises émis par le
chien
Type d'émission sonore
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Circonstances d'apparition
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Aboiement
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Défense, Alerte / Salutation, Invitation au jeu Demande d'attention, de contact ou de soins
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Grognement de satisfaction (gueule fermée)
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Salutation / Contentement/satisfaction
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Grondement (dents extériorisées)
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Menace / Intimidation Alerte
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Gémissement
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Douleur / Peur / Soumission Défense / Salutation Recherche
d'attention
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Cris aigus
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Détresse (chiots et adultes) Soumission (adultes)
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Hurlement
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Isolement Détresse (anxiété de séparation) Chiens nordiques
et chiens courants : communication à grande distance
?
|
Chez le chien, l'aboiement pourrait constituer une
expression de la néoténie (persistance de caractéristiques normalement observées
chez les jeunes seulement), associée au processus de domestication. Chez le
loup en effet, seuls les jeunes aboient. Il est également possible que la
propension des chiens à aboyer résulte de la sélection par l'homme sur l'aptitude
à la garde ou à la chasse.
Des variations existent en fonction de la race. Par exemple, les
basenjis n'aboient pas, en raison de la conformation anatomique particulière de
leur larynx. D'autres races, comme les lévriers, les chows-chows, les races
nordiques et le sharpeï émettent peu de vocalises.
4.2 - Communication auditive homme-chien
Par apprentissage, les chiens de compagnie utilisent des
signaux sonores pour communiquer avec leurs propriétaires. A titre d'exemple,
certains chiens apprennent que lorsqu'ils poussent des gémissements, leur
maître leur accorde un surcroît d'attention.
Les propriétaires de chien clament souvent à qui veut
l'entendre que leur animal comprend tout ce qu'ils lui disent. Qu'en est-il
vraiment ? Lorsqu'un maître s'adresse à son chien, ce dernier perçoit trois
types de signaux :
les signaux verbaux, c'est-à-dire le texte, les mots
employés
les signaux para-verbaux, qui englobent toutes les
caractéristiques de la voix : l'intonation, le débit, les pauses,
l'intensité...
les signaux non-verbaux, c'est-à-dire l'expression
corporelle : les gestes, la posture, la vitesse de déplacement... Ces signaux
sont des signaux de communication empruntant le canal visuel (cf. supra).
Lorsqu'il interagit avec son compagnon, l'homme a souvent
tendance à donner (par anthropomorphisme), une importance prioritaire au
contenu du message, c'est-à-dire au texte. Par apprentissage, un chien peut
effectivement établir des liens entre certains mots (« Assis ! » « Couché ! »,
etc.) et les réponses à y apporter. Mais le vocabulaire que les chiens peuvent
assimiler est limité - entre 20 et 100 mots - et il est clair qu'un ordre tel
que «je t'ai dis de t'asseoir» n'a aucun sens pour un chien qui a appris à
s'asseoir au commandement « assis ». En somme, le verbal joue un rôle
relativement restreint dans la communication homme-chien. Il n'en est pas de
même pour le co-texte, c'est-à-dire le paraverbal et le non-verbal. Bien
souvent d'ailleurs, ce sont ces deux types de signaux qui déterminent la
réponse du chien. Par exemple, un chien qui a appris à stopper un comportement
au commandement « NON ! » prononcé d'une voix forte et autoritaire en fixant sa
croupe répondra de la même manière si on dit « OUI ! » de la même façon. Autre
exemple : si un propriétaire qui appréhende le fait de laisser son compagnon
seul pendant plusieurs heures se lance dans un discours pour expliquer qu'il
doit partir, qu'il reviendra bientôt, qu'il faut rester sage etc., le chien
risque surtout de percevoir l'inquiétude... ce qui accroîtra son anxiété dès
lors que le maître sera parti !
En somme, pour que les paroles du maître aient un sens pour
l'animal, il faut qu'il y ait congruence, c'est-à-dire une synergie entre les
trois types de signaux. Par exemple, il n'est pas logique de gronder son chien
en employant une voix douce ou en adoptant une gestuelle de dominé (regard
fuyant, torse penché vers l'arrière, etc.).En cas de discordance, retenir que
ce sont toujours les signaux non-verbaux et para-verbaux qui priment. Pour que
les ordres soient lisibles pour le chien il faut donc :
Utiliser des mots simples, c'est-à-dire des mots comportant
peu de syllabes (une ou deux : assis, couché, au pied...). Il faut que ces mots
soient suffisamment différents les uns des autres (par exemple, préférer « au
pied » à « ici » ou « viens ici » pour un animal qui répond à l'ordre « assis
»).
S'en tenir à ces mots, et éviter de décliner les ordres sous
différentes formes verbales.
Associer systématiquement le langage à la gestuelle et à
l'intonation, qui sont des signaux parfaitement bien décodés par les chiens.
III - LA SOCIALISATION
Chez le chien, la socialisation - ou développement du
comportement social - est un processus graduel, qui débute durant la période de
transition et se termine durant la période juvénile (cf. encadré). Durant ce
processus, les chiots acquièrent de façon progressive et sous l'influence
directe de leur environnement social l'ensemble des éléments qui leur permettront
par la suite de s'intégrer et de vivre au sein d'un groupe social. En
particulier :
- ils
apprennent l'espèce à laquelle ils appartiennent,
ils identifient les espèces qu'ils considéreront ultérieurement
comme des espèces « amies »,
ils apprennent les moyens de communication
ils apprennent à réguler leur comportement
ils apprennent les règles de vie au sein du groupe
(structure sociale, relations de dominance...).
Principales étapes du développement comportemental chez le
chien
la période néonatale s'étale de la naissance à l'ouverture
des yeux vers l'âge de 2 semaines. Cette période est caractérisée par l'aspect
végétatif des chiots, qui consacrent l'essentiel de leur temps au sommeil.
Leurs compétences nerveuses, sensorielles et motrices sont très limitées et
leur survie dépend totalement des soins dispensés par leur mère.
la période de transition est bornée par l'ouverture des yeux
vers 2 semaines et l'apparition de l'audition vers 3 semaines. Durant cette période, les compétences sensorielles,
nerveuses et motrices des chiots se perfectionnent. Ils deviennent plus autonomes
et commencent à s'ouvrir sur leur environnement physique et social.
la période de socialisation débute vers l'âge de 3 semaines
pour se terminer autour de la 12ème semaine. Cette période est sans doute la période
la plus importante de la vie des chiots. Ils apprennent à quelle espèce ils
appartiennent, les espèces amies, les moyens de communication et débutent
l'apprentissage des règles de vie en société. C'est aussi au cours de cette période
qu'ils fixent les seuils de référence relatives à leur milieu de vie, auxquels
ils évalueront les stimulations rencontrées ultérieurement.
la période juvénile s'étend de la 12ème semaine jusqu'à la
puberté (maturité sexuelle). Les principaux événements qui marquent cette période
sont le détachement (phase prépubertaire) et l'insertion hiérarchique (phase
pubertaire).
1 - L'IMPREGNATION A L'ESPECE ET APPRENTISSAGE DES ESPECES
AMIES
II faut bien comprendre que le chien ne naît pas en sachant
qu'il est un chien : il l'apprend. Et cet apprentissage, de même que celui des
espèces amies, se fait sous l'influence directe de son environnement social aux
premiers stades de son existence.
• L'attachement à la mère
L'attachement des chiots à leur mère constitue une étape préalable
indispensable au bon déroulement de leur développement sensori-moteur, social,
et affectif. Ce lien d'attachement se forme durant la période de transition.
Les compétences sensorielles des chiots leur permettent de se familiariser
progressivement avec les caractéristiques olfactives, visuelles, puis sonores
de leur mère, et de les mémoriser. Ce lien privilégié avec la chienne
persistera jusqu'à ce qu'elle procède au détachement en période pré-pubertaire
(cf. infra). La chienne devient alors le pôle rassurant autour duquel ils vont
organiser leur comportement et notamment leur comportement exploratoire vis à
vis de leur environnement physique et social.
• L'apprentissage des espèces amies
L'apprentissage des espèces amies met en jeu 2 phases
successives : une phase d'attraction et une phase d'aversion. Entre 3 et 5
semaines, le chiot est attiré par tous les êtres vivants qu'il rencontre,
quelle qu'en soit l'espèce, et recherche activement leur contact : les autres
chiens bien sûr, mais aussi les propriétaires, le chat de la maison... Le chiot se
familiarise avec ces individus et apprend, par généralisation, leurs caractéristiques
supra-individuelles (caractéristiques visuelles, olfactives, auditives,
tactiles, etc., propres à l'espèce). A cette occasion, il apprend à identifier
ses semblables, ce qui conditionne son l'aptitude ultérieure de l'animal à
identifier ses « semblables », c'est-à-dire ses partenaires sociaux et sexuels.
C'est la phase d'attraction. Après 5 semaines, l'attraction pour les êtres nouveaux
(c'est-à-dire ceux qui ne présentent pas les caractéristiques
supra-individuelles de ceux fréquentés précédemment) diminue et, en même temps,
débute la néophobie : les chiots évitent de plus en plus les êtres nouveaux.
Cette aversion atteint un pic vers 12-14 semaines et persistera toute la vie de
l'animal. La période sensible pour l'apprentissage des espèces amies commence
ainsi au cours de la 3ème semaine, décroît à partir de la T6™8 semaine, et se
termine entre la 9ème et la 13ème semaine. En milieu naturel, l'évitement des nouvelles
espèces passée la période sensible favoriserait la survie des jeunes, en les protégeant
contre les prédateurs.
• Différences entre la socialisation intraspécifique et
interspécifique
Chez le chien, il existe un certain nombre de différences
entre la socialisation interspécifique et la socialisation intraspécifique.
Dans le cas de la socialisation interspécifique, la généralisation
aux caractères supra-individuels se fait moins facilement que pour la
socialisation intraspécifique. Par exemple, si un chiot n'a pas rencontré
d'enfants durant la période sensible, il risque par la suite de ne pas placer
les enfants dans la catégorie « êtres humains ». Pour une bonne socialisation interspécifique,
il est donc nécessaire de présenter au chiot un nombre important d'individus
humains de types différents (hommes, femmes, enfants, ethnies diverses...).
La socialisation interspécifique est moins stable que la
socialisation intraspécifique. Par exemple, des chiots bien socialisés à
l'homme à l'âge de trois mois peuvent ensuite développer une peur de l'homme
s'ils sont privés de contacts avec des personnes entre 3 et 6-8 mois. A
l'inverse, la socialisation interspécifique est maintenue après une absence prolongée
de contacts avec d'autres chiens. Contrairement à la socialisation intraspécifique,
la socialisation interspécifique doit donc être entretenue pour ne pas disparaître.
La socialisation interspécifique est plus sensible aux expériences
défavorables survenant après la période sensible. Un traumatisme ou une douleur
peuvent ainsi être associés à un type humain particulier. Cela peut déclencher
ultérieurement une peur et/ou de l'agressivité envers ce type de personne.
Chez un sujet socialisé à l'homme ou à toute autre espèce,
mais pas à l'espèce canine (chiots élevés au biberon ou par des chattes, par
exemple), il est relativement aisé de réaliser une socialisation secondaire
intraspécifique, c'est-à-dire après la période de socialisation. Par exemple,
des chiots élevés à l'écart de leurs congénères durant cette période
parviennent à se socialiser à l'espèce canine si on les met en contact avec
d'autres chiens entre la 9ème et la 16ème semaine. Par contre, pour un sujet
socialisé à l'espèce canine mais à qui la socialisation à l'homme fait défaut
(chiots élevés en chenil par exemple), la socialisation interspécifique
secondaire sera relativement difficile à obtenir, et demandera beaucoup de
patience et de temps (plusieurs mois d'apprentissage sont parfois nécessaires).
Le plus souvent, elle ne sera pas généralisable aux humains n'appartenant pas
au groupe familial. Par exemple, si ce groupe de taille limitée ne compte aucun
enfant, le chien risque de manifester des comportements de peur voire de prédation
lorsqu'il rencontrera un enfant. Notons enfin que la socialisation secondaire
n'est possible que pour des animaux ayant pu s'attacher et se socialiser durant
la période sensible. En effet, des chiots maintenus en isolement total durant
la période sensible perdent la capacité de socialiser à quelque espèce que ce
soit, y compris à l'espèce canine.
• Applications
Pour qu'un chien soit bien socialisé à sa propre espèce, il
faut éviter de séparer les chiots de leur mère et de leurs congénères avant le
sevrage. Si cela est impossible (chiots orphelins, chiots séparés des autres
pour cause de maladie...), il faut dès que possible les mettre en contact avec
d'autres chiens.
Pour qu'un chien soit bien socialisé à l'homme, ce qui
constitue, on en conviendra, un élément indispensable à l'établissement d'une
bonne relation chien-homme, il faut veiller à fournir aux chiots des contacts
humains adéquats en quantité et en variété durant la période sensible. Les
chiots doivent être manipulés au moins 15 minutes par jour par des personnes différentes,
d'âge et de sexe variés. A noter que le simple apport de nourriture n'est pas
suffisant pour socialiser un chiot à l'homme : il faut qu'il y ait des interactions
(contacts, caresses, jeux, d'échange vocaux...). Enfin, la socialisation à
l'homme doit être entretenue, au moins jusqu'à la puberté.
2 - L'APPRENTISSAGE DES
MOYENS DE COMMUNICATION ET ACQUISITION DES
AUTO CONTROLES
2.1 -
L'apprentissage des moyens de communication
Durant la période de socialisation (de 3 à 12 semaines), les
chiots apprennent à reconnaître les signaux de communication propres à l'espèce
canine. Ils apprennent également la signification des signaux qu'ils émettent
eux-mêmes en constatant les effets qu'ils déclenchent sur les autres chiens.
Cet apprentissage s'effectue en grande partie à l'occasion des jeux et des
sorties exploratoires. Durant ces activités, les chiots exécutent de nombreux
patrons moteurs proches de ceux observés chez les chiens adultes : ébauches de plus
en plus précises des différentes attitudes de dominance et de soumission,
menaces, chevauchements, flairages ano-génitaux, poursuites, comportement de
prédation, etc.
2.2 -
L'acquisition des auto-contrôles
Jusque vers l'âge de 4-5 semaines, les réponses des chiots
aux stimulations de l'environnement sont pour la plupart des réponses simples
et stéréotypées. Leur intensité ne dépend que du degré d'excitation des chiots.
Au cours de la période de socialisation, ils apprennent progressivement à
moduler leurs réponses, c'est-à-dire à les ajuster en fonction de
l'environnement (physique et social) et des réactions de leurs congénères. Un
exemple typique est celui de l'acquisition de la morsure inhibée. Vers 3-4
semaines, les chiots commencent à se livrer à des jeux de combat au cours
desquels ils grognent et se mordent les uns les autres. Au départ, les morsures
ne sont pas douloureuses. Mais à partir de 5-6 semaines, les premières dents de
lait apparaissent. Ces dents étant fines et pointues, les morsures déclenchent
des cris et une riposte de la part des animaux mordus. Ceci a également pour
effet de faire réagir la mère, qui intervient en séparant les protagonistes. Il
arrive aussi qu'elle corrige le chiot mordeur, en grognant ou en le saisissant
par la peau du cou pour le secouer. De même, si un chiot mord sa mère, elle le
corrige. Peu à peu, les chiots acquièrent ainsi :
fa capacité d'interrompre les séquences de combat en fonction
des éléments extérieurs (cris des chiots, correction)
la capacité à contrôler la contraction de leurs muscles
masticateurs. L'âge normal d'acquisition de la morsure inhibée est de J45 à
J50.
2.3 - Applications
Pour favoriser une bonne acquisition des moyens de
communication propres au langage canin et des auto-contrôles, il faut laisser
le chiot suffisamment longtemps en contact avec la chienne et les autres chiots
: au moins jusqu'à l'âge de 2 mois. Si cela n'est pas possible, il faut veiller
à exposer fréquemment les chiots à des chiens adultes « éducateurs », grâce auxquels
ils poursuivront ces apprentissages.
3 - LE DETACHEMENT
3.1 - Déroulement normal du détachement dans l'espèce canine
Nous avons vu plus haut que l'attachement du jeune à sa mère
constitue une étape préalable indispensable au bon déroulement de la socialisation. Cet
attachement est fondamental à la stabilité affective du jeune animal, la mère
constituant un pôle rassurant autour duquel son comportement s'organise et se
développe. Lorsque les chiennes restent en contact avec leur portée, on
constate qu'elles procèdent systématiquement au détachement de leurs chiots. Ce
détachement se fait de façon progressive. Il est initié au moment du sevrage,
qui débute généralement vers l'âge de 5 semaines pour se terminer vers 7
semaines. La chienne accepte de moins en moins que les chiots restent à
proximité d'elle. Elle s'implique de moins en moins dans les jeux et les
interactions affectives. Cette distanciation augmente graduellement jusqu'à
aboutir dans un premier temps à la séparation des lieux de couchage puis, dans
un second temps, à une interdiction d'approcher.
Cette seconde phase apparaît plus précocement pour les
chiots mâles que pour les femelles. Pour les mâles, elle survient vers l'âge de
4-5 mois, et pourrait être liée aux modifications des caractéristiques
olfactives et phéromonales survenant en période pré-pubertaire. Cet épisode
débouche sur la marginalisation des chiots. Pour les jeunes femelles, le processus
est plus lent et ne s'achève souvent qu'au moment du premier, voire du second
oestrus. Il aboutit rarement à une marginalisation aussi marquée que celle
subie par les mâles.
Le détachement est un événement important dans la vie du
chiot, puisqu'il conditionne l'acquisition de l'autonomie et le passage d'un
attachement exclusif à la mère à un attachement dirigé vers l'ensemble du
groupe social. De plus, il contribue à l'apprentissage des règles sociales,
l'autorisation d'approcher la mère durant le détachement étant de plus en plus
subordonnée à l'émission préalable de signaux d'apaisement et de soumission.
3,3 - Applications
Un chiot arrive généralement dans sa famille d'accueil vers
l'âge de 2-3 mois, c'est-à-dire alors qu'il est encore en état d'attachement à
sa mère. Il perd donc le pôle sécurisant autour duquel sa vie s'organisait et
cette rupture provoque un état de détresse. Cet état de détresse trouve
généralement sa résolution dans l'établissement d'un nouveau lien d'attachement
avec l'un des membres de la famille. Généralement, il s'agit de la personne
qui lui donne à manger et lui prodigue le plus d'attentions (caresses,
brossages...). Il peut également s'agir
- rarement -
d'un autre animal vivant au sein du foyer. Ce nouvel attachement est bénéfique car
il permet la stabilisation émotionnelle du chiot... à condition que la personne
procède ensuite, vers 4-5 mois, au détachement comme l'aurait fait la chienne. Ce
détachement doit
s'opérer à plusieurs niveaux :
éloigner le lieu de couchage du chiot de celui des maîtres,
repousser ou ignorer le chiot lorsqu'il sollicite des
caresses ou l'attention de ses maîtres. Ces derniers peuvent néanmoins
prodiguer autant de caresses qu'ils le souhaitent, à condition qu'ils en soient
les initiateurs,
- favoriser
l'intégration du chien à l'ensemble du groupe en interdisant à l'animal de
suivre la même personne et en faisant en sorte qu'il ne privilégie pas les
contacts avec cette seule personne. Tous les membres de la famille doivent donc
s'occuper du chien.
Si le chiot est acquis après 3 mois, il est préférable de
procéder directement au détachement. En particulier, il faut éviter de céder
aux gémissements du chiot pendant la nuit. Ceci peut être facilité en procurant une
bouillotte à l'animal. L'absence de détachement peut déboucher sur un trouble
caractéristique appelé anxiété de séparation.
4 - L'INSERTION HIERARCHIQUE
L'apprentissage des règles hiérarchiques détermine l'intégration
du jeune animal au sein de la
meute. La hiérarchisation s'opère au niveau des quatre pôles
principaux évoqués précédemment : l'accès à l'alimentation, la gestion de
l'espace, l'accès à la sexualité, et la gestion des contacts.
4.1 — Déroulement de la hiérarchisation dans l'espèce canine
• La hiérarchisation
alimentaire
Avant le sevrage, l'accès à la mamelle n'est pas déterminé
par les éventuelles relations de dominance (toujours temporaires) qui peuvent
exister entre les chiots. Ce n'est qu'après le sevrage (S5 à S7), que les
chiots font l'expérience de la hiérarchisation alimentaire. Les chiots ont
alors accès à deux sources de nourritures : les aliments prédigérés régurgités
par la mère et la nourriture collective. Pour obtenir les aliments prédigérés,
les chiots lèchent les babines de leur mère, sollicitant la régurgitation de
son contenu stomacal. Ce comportement caractéristique acquerra progressivement
une valeur de signal destiné à apaiser la chienne puis les autres congénères.
Dans le second cas (nourriture collective), les chiots qui tentent de
s'approcher de la source de nourriture se font fraîchement accueillir : ils
sont repoussés par des grognements, voire des morsures de la part des chiens
adultes, surtout si ces derniers sont en train de consommer leur repas. Les
chiots, qui ont un statut de dominés au sein de la meute, apprennent
progressivement à attendre et à respecter l'ordre de préséance alimentaire.
Quand arrive leur tour, ils s'approchent lentement de la nourriture (les
dominants en laissent toujours un peu) en émettant des signaux d'apaisement et
de soumission.
• La hiérarchisation
spatiale et territoriale
Cette étape est contemporaine de la puberté chez les mâles,
et survient un peu plus tardivement chez les femelles (second oestrus). Les
jeunes chiens sont expulsés des zones fréquentées par les dominants et se
voient contraints à rechercher un lieu de couchage en périphérie du territoire
de la meute.
• La hiérarchisation
sexuelle
Lorsqu'ils s'approchent des femelles adultes, les jeunes mâles
se font rejeter par les mâles dominants. Ils apprennent ainsi à ne pas exhiber
leur sexualité en présence du reste de la meute et à n'opérer qu'à l'abri des
regards. Pour les jeunes chiennes, la hiérarchisation sexuelle est moins
tumultueuse. Néanmoins, certaines observations laissent penser que la présence
de femelles adultes exerce un effet inhibiteur sur la sexualité des jeunes
femelles. En effet, certains auteurs ont constaté que les jeunes femelles séparées
de leur mère ont des chaleurs plus expressives que celles qui restent en
contact (congestion vulvaire plus intense, comportement de cour plus marqué,
etc.).
• La gestion des contacts
Enfin, le chiot apprend qu'il ne faut ni initier les
interactions ni solliciter les contacts avec les animaux de rang hiérarchique
supérieur.
4.2 - Applications à l'insertion du chiot dans sa famille
d'accueil
Dès l'arrivée du chiot, les maîtres doivent s'imposer comme
les chefs de meute, en veillant à ce qu'aucune prérogative de dominant ne soit
accordée au chiot.
• L'alimentation
Les repas du chiot doivent avoir lieu après ceux des maîtres,
ou alors de façon complètement dissociée dans le temps (au moins une heure
avant). Il faut renvoyer le chiot dès qu'il quémande, et on conseille de ne pas
laisser la gamelle à sa disposition pendant plus de 15 : même s'il n'a pas
terminé, il faut passé ce délai lui retirer sa gamelle jusqu'au prochain repas.
Enfin, les maîtres ne doivent pas assister aux repas.
• L'espace
II faut attribuer au chiot un lieu de couchage dans un
endroit périphérique, d'où il ne peut pas contrôler les allées et venues
(surtout pas dans le couloir ni dans la chambre des maîtres !). Il est également
conseillé d'éviter les zones d'activité, comme la salle à manger où le salon.
Il est recommandé d'interdire au chien l'accès à certaines pièces de
l'habitation. Une fois le lieu de couchage trouvé, le chien doit être respecté
dans son domaine : il ne faut pas l'y déranger, l'y gronder ou le caresser
(c'est son refuge). Le lieu de couchage constitue aussi un endroit de
soumission. Lors des conflits, il est en effet recommandé de renvoyer le chien à
son panier. S'il obéit, c'est qu'il accepte la soumission. Dans
ce cas, le conflit doit cesser immédiatement pour éviter toute réaction de détresse.
• Le
comportement sexuel
Les maîtres ne doivent en aucun cas tolérer l'exhibition de
comportements sexuels en leur présence (monte, chevauchements), même sur des
substrats inertes (coussins).
» Les contacts
Les jeux et les caresses doivent être initiés par les maîtres
exclusivement. Si le chien les sollicite pour des caresses ou ramène une balle
pour jouer, ils ne doivent pas répondre mais l'ignorer, ou le renvoyer dans son
panier. Après quelques minutes par contre, ils peuvent rappeler leur chien pour
lui prodiguer des caresses ou jouer. Les maîtres décident également de la durée
de l'interaction.
Le non-respect de ces règles de base peut amener le chien à
se considérer comme dominant et déboucher sur des troubles de la relation homme-chien
appelés sociopathies.
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