Considérations sur la Race
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[Considérations sur la Race][Les Régions du corps][Les Types Morphologiques][Anatomie de l'Appareil Locomoteur][Allures et Locomotion][Nomenclature des Robes][La Notion de Standard][Conduite de l'élevage][Notions de Génétique][Le Comportement Social du Chien][Principes de Jugements]

 

CHAPITRE I
QUELQUES CONSIDÉRATIONS SUR LA RACE

 

 

II n'y a plus de doute maintenant : le Chien est issu de la domestication du Loup. Comme, de surcroît, les deux espèces s'hybrident sans difficulté et donnent naissance à des produits indéfiniment féconds, la tendance est forte aujourd'hui à considérer qu'ils ne forment qu'une seule espèce.

FORMATION DES RACES

On entend volontiers dire que la notion de race est totalement artificielle, inventée par l'homme, lequel en fabriquerait et en ferait disparaître à volonté. Une telle opinion traduit une ignorance de ce qu'est la race.
C'est au départ une notion zoologique : toute espèce à vaste répartition géographique se scinde, sous l'effet des particularités du milieu et des mutations, en un certain nombre de sous-espèces (ou races) géographiques, qui se distinguent par quelques caractères visibles. Ainsi les zoologistes distinguent une trentaine de sous-espèces de Loup, et il est probable que beaucoup d'entre elles étaient déjà constituées au moment de la domestication du Chien.
Trois sous-espèces de Loup seulement auraient été soumises à domestication, dont sont dérivées peu à peu, sous l'action du milieu et celle, ténue, de l'Homme dans le contrôle de la reproduction, un nombre limité de grands ensembles ayant valeur de races primaires, dites encore races fondamentales ou grand'races. L'identité de ces dernières est discutée chez le Chien. Sans doute approche-t-on de près la réalité en empruntant les qualificatifs morphologiques de Pierre MEGNIN et l'on aurait alors les races primaires suivantes : lupoïde, braccoïde, molossoïde, graioïde (= lévriers), auxquelles il conviendrait probablement d'ajouter une race primitive (Dingos, chiens africains etc...).
Tout au long de l'histoire, les grands ensembles que constituent les races primaires n'ont pas cessé de se différencier géographiquement, éclatant en une multitude de races dérivées (secondaires, tertiaires etc..., du moins en théorie). Dans le même temps, des croisements pouvaient survenir, avec des chiens les plus divers. Il ne faut toutefois pas conclure que les croisements avaient été tels que tout était mélangé : lorsque, au XIXème siècle, il s'est agi d'identifier les races, avant de définir un standard et d'ouvrir un livre généalogique, il n'y a guère eu de difficulté à identifier les animaux qui, spontanément, étaient reconnus comme appartenant à la race de telle région (Epagneul breton, Braque d'Auvergne, Berger picard etc), même si certaines étaient déjà devenues cosmopolites (Caniche par exemple).
Si elles naissent officiellement au XIXème siècle, avec la définition d'un standard et l'ouverture d'un livre généalogique, la plupart des races ont donc une longue histoire derrière elles, faite, dans une région donnée, de l'action du milieu, de la reproduction avec des congénères proches géographiquement, d'un minimum de sélection de la part de l'homme et de croisements divers, dont les effets finissent par se diluer.
Que penser alors des nombreux exemples de races dont on dit qu'elles ont été créées par croisement de plusieurs populations et qui portent, parfois, le nom du créateur ? Même si on leur en reconnaît le statut, elles ne constituent pas des races à proprement parler. Parce que, souvent, l'une des populations mères domine sur les autres, l'idéal serait de les considérer comme des variétés de ces dernières. Ce n'est toutefois pas possible dans les rares cas où l'on a réussi à bâtir un véritable type intermédiaire (Dogue allemand par exemple) et l'on est alors en présence d'une véritable race d'origine métisse ou race synthétique.
A partir du moment où une race dispose d'un standard et d'un livre généalogique, le contrôle de la reproduction par l'Homme est en principe total, mis au service d'une sélection qui vise à l'améliorer et l'homogénéiser. Telle est la situation que nous connaissons depuis un siècle.

STRUCTURE GÉNÉTIQUE DES RACES

Les définitions de la race sont innombrables. Retenons en deux :
• pour le législateur français (Décret relatif à l'amélioration génétique du 14 juin 1969) : une race doit recouvrir un ensemble d'animaux d'une même espèce présentant entre eux suffisamment de caractères héréditaires communs. Le modèle de la race est défini par l'énumération de ces caractères héréditaires avec indication de leur intensité moyenne d'expression dans l'ensemble considéré" ;
• pour THÉRET (1981), la race est une "population animale prise au sein d'une espèce, caractérisée par un génotype moyen particulier conduisant à la manifestation d'un phénotype intéressant la morphologie (conformation), la robe et une certaine tendance d'aptitude (physiologie et psychologie) pouvant varier en fonction des conditions de milieu dans lequel sont exploités les animaux".
Ces définitions sont prudentes. Elles mettent en évidence deux faits importants : les animaux ne se ressemblent pas pour la totalité des caractères mais pour certains seulement et, globalement, il subsiste une variabilité suffisante au sein de la race.
Tout cela peut surprendre car l'idée vient spontanément que des animaux de la même race se ressemblent nécessairement beaucoup.... En réalité, la race réalise au plan génétique un compromis entre homogénéité et hétérogénéité : l'homogénéité augmente nécessairement sous l'effet de la sélection, mais il importe de ne pas aller trop loin et de laisser subsister une variabilité génétique suffisante. En effet, à un moment donné, il peut arriver que les utilisateurs de la race recherchent des types variés d'animaux. Surtout, l'examen de l'iconographie disponible depuis un siècle incite à l'humilité : ce que l'on considère comme le beau chien aujourd'hui ne l'aurait peut-être pas été il y a 50 ans et ne le sera peut-être pas dans 50 ans. Il importe donc qu'une race conserve les possibilités d'évoluer par elle-même dans une autre direction. Devenue trop homogène, la race est figée dans un modèle dont elle ne peut plus se sortir, sauf à recourir au croisement. Le recours à ce dernier, s'il n'est en soi pas répréhensible dès lors qu'il n'y a plus d'autre solution et qu'il se fait d'un commun accord entre les éleveurs, concrétise toutefois un échec de la sélection.
Au total, l'idée que les animaux d'une même race soient, plus ou moins, des "copies conformes" les uns des autres est étrangère à la notion même de race mais caractérise plutôt les lignées consanguines. Le maintien d'une diversité génétique acceptable par les éleveurs, mais aussi suffisante est, au contraire, inscrit dans la notion de race.
Cette diversité génétique intra-race peut être répartie exclusivement au hasard sur l'ensemble des animaux. Elle peut aussi, en partie, résulter du fractionnement de la race en un certain nombre de sous-unités auxquelles nous allons nous intéresser.

LES GROUPES INFRA-RACIAUX

Nous retiendrons la variété, la souche, la lignée consanguine.
La variété (synonyme aujourd'hui de sous-race, alors qu'on établissait une différence entre les deux au XIXème siècle) comprend un ensemble d'individus d'une race donnée qui se distinguent de celle-ci par un petit nombre de caractères héréditaires. Si les variétés gagnent à se reproduire sur elles-mêmes, il est nécessaire qu'elles se "croisent" de temps en temps entre elles afin d'éviter une trop grande dérive par rapport à la moyenne de la race. De toute manière, exprimer suffisamment nettement les caractères distinctifs mais appartiennent néanmoins à la race. Souches et lignées consanguines sont également mises en place.

LES JUGES ET LA SÉLECTION

Le but de la sélection est double :
• générer du progrès génétique ou, si l'on préfère, "améliorer" la race, c'est-à-dire la faire
évoluer dans une direction considérée conjoncturellement comme souhaitable ;
• dans le même temps, y conserver suffisamment de diversité pour lui permettre, le cas
échéant, de s'orienter dans une autre direction.
Autrement dit, il s'agit, pour la race dans son ensemble, de faire se reproduire surtout des animaux susceptibles de l'améliorer mais aussi, dans une mesure évidemment bien moindre, des sujets qui s'éloignent des objectifs recherchés.
Par ailleurs, si l'on considère qu'un animal est officiellement "non consanguin" lorsque ses parents n'ont pas d'ancêtres communs sur cinq générations (!), on peut conclure que la majorité des chiens de race est plus ou moins consanguine et qu'il n'a donc pratiquement pas été prêté attention au deuxième volet de la sélection.
Il est d'abord du ressort du club de race de définir des objectifs, de faire un état des lieux de ce qui peut exister encore comme souches ou lignées dans la race, puis de s'assurer par la suite qu'aucune sous-population originale ni aucun courant de sang ne disparaît. A son niveau, le juge se doit d'avoir "les idées larges" dans l'interprétation du standard et les conseils qu'il donnera aux éleveurs. H doit se remémorer qu'une race n'a pas vocation à devenir une population consanguine et que, si elle le devient, il y a, d'une certaine manière, échec de la sélection.
Paradoxalement, il est un secteur où trop déjuges se laissent volontiers aller à un excès de tolérance à l'égard de la diversité : il s'agit des chiens hypertypés, dont certains font carrière comme champions internationaux. Nous n'avons pas à discuter ici des raisons pour lesquelles des juges se laissent séduire par de tels animaux ni quels sont les inconvénients de l'hypertype pour le chien lui-même. Nous nous contenterons de dire que les chiens hypertypés sont souvent hors standard (hypertype = manque de type) et qu'en toute logique, ils ne devraient pas être confirmés.

CONCLUSION

L'idée que se font les éleveurs de la notion de race est souvent très éloignée de ce qu'en disent les scientifiques. Ces derniers conviennent certes que l'essentiel est que les éleveurs sélectionnent convenablement la population de chiens dont ils s'occupent : peu importe à la limite qu'elle soit appelée race, variété ou souche. Mais il faut remarquer qu'augmenter artificiellement le nombre de races suppose le plus souvent une réduction des effectifs de chacune d'entre elles ce qui, ajouté à la pratique quasi-systématique d'une consanguinité large, conduit à une réduction importante de la variation génétique. C'est alors la survie à long terme de la population qui est en cause et, du même coup, le travail de sélection effectué risque d'aboutir à un échec.
Il n'est donc pas inutile que les éleveurs et les juges prennent un peu de recul face à la notion de race, situent leur travail dans un contexte évolutif à long terme, comprennent que l'homogénéité à tout prix n'est qu'un aspect de la question et découvrent la nécessité d'une véritable gestion génétique des races de chiens.

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